Garder la caution avec un devis : est-ce suffisant ?

1 340 euros qui disparaissent sans bruit, sur simple papier à en-tête : chaque année, des milliers de locataires se voient retenir leur dépôt de garantie sur présentation d’un devis. Le geste est courant, la pratique beaucoup moins encadrée qu’il n’y paraît.

Face à ce constat, il faut le dire sans détour : de nombreux propriétaires s’arrogent le droit de conserver la caution en ne fournissant qu’un devis, oubliant trop souvent la facture ou la preuve de paiement. Le locataire, lui, se retrouve bien démuni devant ce jeu de documents, sans toujours connaître l’étendue de ses droits ni les leviers à sa disposition.

Déposer une caution : à quoi sert réellement le dépôt de garantie ?

Le dépôt de garantie ne se contente pas de rassurer le propriétaire. Dès la signature du contrat de location, il pose les bases d’un accord : le locataire verse une somme d’argent, qui offre au bailleur une protection contre trois risques bien identifiés. Ce sont les loyers impayés, les charges locatives non réglées et les dégradations imputables à l’occupant. Pas de place à la fantaisie : la loi fixe le montant maximal à un mois de loyer hors charges pour une location vide, à deux mois pour une meublée. Impossible d’aller au-delà.

Le contrat de bail mentionne toujours le montant du dépôt de garantie. Cette somme demeure la propriété du locataire jusqu’à la fin du bail, sauf incident. Le bailleur ne peut pas décider seul de s’en servir, il lui faut des motifs clairs et avérés pour y toucher : sommes dues ou réparations justifiées. Prudence aussi : le dépôt n’est jamais destiné à régler le dernier loyer, même si un accord verbal a été donné. Le risque de litige est alors bien réel.

Le dépôt de garantie n’est pas un filet de sécurité universel. Les dégradations dues à l’usure ordinaire, ce que la loi appelle la vétusté,, tout comme les malfaçons ou vices de construction, ne peuvent être facturés au locataire. Seules les détériorations constatées lors de l’état des lieux de sortie, en comparaison avec celui d’entrée, peuvent justifier une retenue. Pour les locataires aux revenus plus modestes, des dispositifs comme le FSL ou Action Logement peuvent avancer cette somme, mais la règle ne change pas : ce n’est pas une avance sur loyer, c’est une garantie strictement encadrée.

Voici les points à retenir autour du dépôt de garantie :

  • Plafond légal : 1 mois de loyer hors charges pour un logement vide, 2 mois pour un meublé
  • Usage limité : uniquement pour les loyers, charges impayées ou réparations justifiées
  • Restitution : à la sortie du locataire, sauf preuve concrète d’un manquement

Garder la caution avec un simple devis : ce que dit la loi et la pratique

La question revient sans cesse : un devis présenté par le propriétaire suffit-il à justifier la retenue du dépôt de garantie ? La loi ne laisse pas la porte ouverte à toutes les interprétations. Un bailleur ne peut conserver la caution qu’en cas de dégradations constatées lors de l’état des lieux de sortie, en comparaison avec celui d’entrée. Le devis sert alors de justificatif pour le montant retenu, même si les travaux ne sont pas encore réalisés.

Les tribunaux ont tranché à plusieurs reprises : devis ou facture, l’un ou l’autre fait foi. Pas besoin d’attendre que les réparations soient achevées pour expliquer un retard de restitution. Mais chaque somme retenue doit être clairement expliquée dans le courrier de restitution adressé au locataire, avec le devis ou la facture en pièce jointe. À défaut, le propriétaire risque de devoir verser des pénalités : 10 % du montant du dépôt par mois de retard injustifié.

Le délai de restitution varie selon la situation : un mois si aucun dégât n’est signalé, deux mois si des retenues sont justifiées. Dans certains cas, une provision de 20 % peut être conservée en attendant l’arrêté annuel des charges, notamment dans les copropriétés.

Pour mieux cerner les obligations du propriétaire, voici les bases à respecter :

  • État des lieux contradictoire : indispensable pour établir toute retenue
  • Devis ou facture : justificatif obligatoire à fournir au locataire
  • Lettre de restitution : chaque somme prélevée doit être expliquée, document à l’appui

La grille de vétusté reste le garde-fou du locataire : elle interdit au bailleur de retenir la caution pour l’usure normale, les défauts de construction ou les malfaçons. Dans les faits, le devis pose un cadre strict, mais il ne permet pas toutes les interprétations. Pour chaque euro gardé, la justification doit être limpide, factuelle, et ne souffrir aucun doute.

Jeune femme dans son appartement tenant un contrat de location

Litige sur la retenue du dépôt de garantie : solutions concrètes pour les locataires et propriétaires

Quand la restitution du dépôt de garantie devient un champ de bataille, chaque partie peut agir. Côté locataire, il s’agit d’abord d’envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception au propriétaire. Cette étape officielle rappelle à chacun ses obligations et permet de réclamer la restitution de la somme contestée, en s’appuyant sur le devis fourni. Mentionnez précisément les motifs du désaccord : vétusté, montant jugé disproportionné, absence de document probant. Le bailleur doit alors répondre, justificatifs à l’appui.

Si la discussion s’enlise, la commission départementale de conciliation entre en scène. Gratuite et accessible, elle réunit locataires et propriétaires autour de la table, sans procédure lourde. Chacun expose ses arguments, pièces justificatives à l’appui. Dans la majorité des cas, un accord écrit est trouvé rapidement, bien avant qu’un juge ne soit saisi.

Si la médiation échoue, reste la voie judiciaire : le tribunal d’instance. Ici, le propriétaire doit prouver ses retenues : devis, états des lieux, échanges de courriers… S’il manque de preuves concrètes, il s’expose à devoir rendre la somme prélevée et à payer des intérêts de retard. Pour éviter les mauvaises surprises, bailleurs comme locataires ont tout intérêt à conserver chaque document, chaque échange. La transparence, dans ce domaine, fait souvent la différence.

À la sortie d’un logement, le dépôt de garantie ne devrait jamais être l’objet d’un bras de fer. Un dossier solide, une communication claire, et les règles du jeu deviennent limpides. Le vrai enjeu, c’est que la confiance l’emporte sur la suspicion, et que chacun retrouve ses droits, sans détour ni calcul.

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